Inspirée

Tu voudrais avoir des choses à dire
alors tu ouvres la bouche
et ça sort.

« Y avait du monde à la boulangeire, pff! »

Bravo.

Tu voudrais avoir des choses à dire
alors tu ouvres une page blanche
tu tapes et tu effaces, tu tapes et tu effaces, tu fermes la page.

Tu as des choses à dire
alors tu prends de quoi écrire, tu plonges dans une pièce vide et fermes la porte.

Tu es fébrile en allumant l’écran.

L’enfant est plus rapide que toi
elle est déjà contre ta cuisse.
Ses mots à elle font s’envoler les tiens,
bouche soufflant sur le pissenlit blanc
disperse les aigrettes fragiles dans l’air.

Tu te veux inspirée
pourtant les pensées restent bourgeons
pas assez de soleil ni d’eau pour les faire éclore
ta terre est tarie.

Si le monde donne le souffle
il y a du monde pour te le souffler
te prendre l’énergie nécessaire
pour aller plus loin que tes besoins primaires.

Tu te mets à faire des rimes
trop faciles
sans les chercher
réflexes d’écriture
pour parler quand on ne sait plus.

Les pas dans l’escalier approchent
cette fois tu as eu plus de temps
mais voilà le
– Maman! A table!
et tu éteins la lumière.

Pourquoi j’écris.

Qu’est-ce qui fait qu’on a besoin de prendre un stylo et de sortir des mots?

Je vais devant vous glisser sur mon écran comme on surfe, et prendre ce qui vient pour tenter de répondre.

D’abord c’est ça écrire, c’est laisser sortir les flots de ma pensée par mes doigts. En passant par l’outil d’écriture, elle prend forme et devient quelque chose de beau. De beau forcément oui car aimée, polie, créée par volonté.

L’écrit est alors autre chose que ce qui flottait dans mon esprit. Le contenu s’est affiné, transformé. Et les rebus sont étrangement réintégrés au matériau de départ et pourront fournir d’autres récits. Car quand on écrit on se rend compte que rien n’est figé ni sûr, tout est possible.

Ce que produit mon esprit chaque minute va, vient, vit et telle l’eau de l’océan prend 1000 formes pour 1000 voyages.

Ensuite je regarde ce qui est produit, l’examine en toutes coutures, puis sort couteau et lame pour terminer en détails l’Œuvre. Lorsque je suis plus satisfaite que sceptique, je dis: « c’est fini! ».

Mais quel plaisir cela apporte-t-il?

En fait je ne sais pas. J’écris comme je marche dans la rue, parce qu’il le faut, parce que c’est ma vie, parce que je suis bien quand je le fais et après aussi. Je sens que cela me nourrit, que c’est mon carburant et mon bonheur, une des activités qui fait que j’aime vivre.

Quand j’écris pour moi seule, je médite, j’examine, j’essaie de me comprendre. Et je prends de la hauteur. Ainsi ce que je vis m’apprends et je me vois bouger, changer, peut-être devenir une meilleure version de moi-même.

Quand j’écris des phrases courtes sur un réseau social, je veux souvent divertir et alors je joue avec la réalité. Les traits sont amplifiés, les faits remodelés, j’invente une petite histoire en quelques signes. Je produis une sorte de strip dessiné de lettres. Alors je me fais rire, ou hurler, tout en sentiments forts, d’abord pour moi et si cela marche sur d’autres aussi, tant mieux.

Maintenant que j’écris ici, qu’est-ce que je cherche?
Je continue à marcher, simplement. Mais je prends un sentier que je ne connais pas encore, un peu différent de ceux que j’arpente d’habitude.
Je cherche le plaisir de découvrir de nouveaux paysages, la griserie d’un effort plus dense qu’au quotidien, un défi aussi lancé à moi-même.
Alors écrire devient une activité plus choisie, plus guidée, « Et qu’ça m’plaise! ».